Wed 16 Apr 2025
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Question de croire

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Question de croire


Existe-t-il quelque chose après la mort ou est-ce que notre existence se termine à notre décès? Cette grande question hante l’humanité depuis des millénaires.
 
Dans cet épisode, Joan et Stéphane constatent que nous ne possédons pas de réponses définitives devant ce grand mystère et explorent les principes théologiques, bibliques et pastoraux qui nous guident dans cette quête de sens.
 

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* Musique de Lesfm, pixabay.com. Utilisée avec permission. 
* Photo de Tharva Tulsi, unsplash.com. Utilisée avec permission.
 
Transcription: 
Bonjour! Bienvenue à Question de croire qui aborde la foi et la spiritualité, une question à la fois. Cette semaine, est-ce qu\'il y a quelque chose après la mort? Bonjour Stéphane. Bonjour Joan. Bonjour à toutes les personnes qui sont à l\'écoute.
 
Les points de vue différents sur la vie après la mort
 
Moi je viens d\'un courant religieux ou une tradition confessionnelle, une dénomination, enfin voilà, tous les mots peuvent être utilisés... dans laquelle on ne parle pas beaucoup de ça. On ne parle pas beaucoup de ce qu\'il y a dans l\'après. À priori, ça va être quelque chose de plutôt bien, plutôt sympa, et surtout, il y aura beaucoup de paix, ça, c\'est sûr, ce sera un royaume de paix. J\'en étais restée un peu à ça, quelque part, on ne sait pas où, comment ou quoi, mais hyper paisible. Puis un jour, en parlant avec une amie qui est théologienne aussi, qui est religieuse et qui a un arrière-fond évangélique, elle me dit qu\'elle ne comprend pas du tout les veufs et les veuves qui se remarient. Vraiment elle ne comprend pas; elle trouve que ça ne fait pas sens d\'un point de vue biblique. J\'essaie de comprendre un peu parce que j\'ai l\'impression que les réformateurs se sont mariés avec des veuves et puis voilà, je suis un peu perdue. Elle me dit « mais tu comprends dans la Bible, finalement, comment feront les veufs et les veuves qui se sont remariées? Puisque d\'après la Bible, on va tous être réunis dans le royaume, dans le paradis, dans l\'au-delà. Finalement, les couples vont se reformer. Mais si tu t\'es remariée quand tu es veuf ou veuve, ça n\'a pas l\'air OK, quoi, par rapport à la Bible ». Moi, je n\'avais jamais pensé à ce genre de contingence. C\'est là que j\'ai découvert que plein de gens se posaient des questions. C\'est malheureux, c\'est vrai, mais tu perds un doigt. Est-ce qu\'après la résurrection des morts, tu retrouveras ce doigt ou pas ? Alors, il y a plein de théories. On aura un corps parfait, on sera dans un état en quelque sorte de perfection et de béatitude. Et donc, du coup, est-ce que les relations amoureuses font partie d\'un état de béatitude et de perfection? Oh là, tu ne peux pas savoir! Je n\'avais jamais entendu parler de ça et d\'un coup, j\'avais tellement d\'idées dans ma tête!
 
Le grand mystère de la vie au-delà de la mort
 
C\'est vrai que c\'est une des grandes questions de l\'humanité. En tant que chrétien, on nous a enseigné qu\'il y a quelque chose d\'autre. On attend la grande résurrection, le jugement dernier, diront certains. Mais c\'est un mystère. Lorsqu\'on parle de mystère religieux, on arrive souvent à un niveau qu\'on ne peut pas comprendre avec notre cerveau. Ça va au-delà de notre capacité d\'imaginer quelque chose. Qu\'est-ce que sera cette vie après la mort? On ne sait pas. Il n\'y a personne qui est revenu. Bon, on peut dire Jésus, mais... Et je crois que c\'est ça le défi. De croire en quelque chose qu\'on ne peut pas comprendre, qu\'on ne peut surtout pas démontrer, et d\'essayer de conceptualiser ça, c\'est très dur.
 
Serons-nous les mêmes après la résurrection?
 
Alors bien sûr, je suis allée un peu chercher des passages bibliques, et c\'est vrai qu\'il y a Romains 8, 11 : « Si l\'esprit de celui qui a ressuscité Jésus d\'entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité Christ d\'entre les morts rendra aussi la vie à vos corps mortels par son esprit qui habite en vous. » Voilà, d\'après ce passage, si on en fait une compréhension purement littéraliste, ce qui n\'est pas vraiment l\'habitude de notre podcast, il faut le dire, eh bien finalement, cette même puissance d\'amour rendra la vie à nos corps mortels. Après, est-ce que rendre la vie, c\'est redonner exactement la même vie? Est-ce que rendre la vie, c\'est nous faire faire la même chose après la Résurrection que ce qu\'on a fait avant lors de notre existence terrestre? Comme tu dis, c\'est un mystère et j\'ai l\'impression que les interprétations sont ouvertes, en fait. Mais ce qui m\'intéresse, c\'est de savoir si ça angoisse les chrétiens et les chrétiennes, si ça les empêche d\'avancer dans leur foi. Si ça crée de l\'angoisse, il faut qu\'on puisse y répondre.
 
L’incapacité de prouver une vie après la mort
 
Souvent, j\'ai entendu des personnes dire que la religion, c\'est un peu comme une béquille pour endurer notre monde parce qu\'on nous promet quelque chose de beau, qui a un sens et qu\'on va être récompensé au-delà de notre vie terrestre. Mais en même temps, je dis que ça peut être épeurant parce qu’on n\'a pas de définition de ce que sera cette vie éternelle, cette vie au-delà de la vie. Et du coup, si ce n\'est pas plaisant, on peut être triste pendant longtemps. Du coup, je préfère ma vie terrestre à ma vie au-delà de la mort. Ça peut être complètement angoissant. Donc je ne trouve pas ça nécessairement rassurant de ne pas avoir de réponse claire. Et je comprends qu\'il y ait des gens qui veulent savoir, qui vont voir leur pasteur, leur leader d\'Église qui lui disent : « Peux-tu me prouver qu\'il y a quelque chose au-delà de la vie, au-delà de la mort? Peux-tu me garantir ce que c\'est? » Et si on est moindrement honnête, on ne peut pas dire oui, je peux te garantir qu\'il y a quelque chose. Je ne peux pas dire que c\'est ceci ou cela.
 
Peut-on communiquer avec les personnes mortes
 
Je dois reconnaître que j\'ai souvent de la réticence lorsqu\'on me parle de démarches consistant à aller voir des personnes qui déclarent avoir cette capacité, ce don de dialoguer avec le monde immatériel, avec celles et ceux qui ne sont plus là, si ce n\'est dans nos souvenirs, nos pensées, les traces qu\'on a laissées sur terre. Et puis pourtant je comprends, quand on perd quelqu\'un, peut-être brusquement, qu\'on a beaucoup aimé et avec qui on aurait encore beaucoup de choses à partager. Parfois il y a aussi des interrogations sur comment la personne est morte, est partie, a disparu. Il se trouve que certaines personnes disent avoir cette possibilité d\'entrer en contact avec eux. Alors je rentre dans une forme d\'empathie, de compassion, de compréhension. Je me dis que pastoralement, c\'est tout ce qui nous est demandé en quelque sorte, d\'acter le fait que c\'est très dur, la mort, le deuil, la séparation, et qu\'il y a des moments où en plus ça se passe trop vite. Ce besoin de béquille, toujours autour de la mort.
 
La recherche de signes d’une vie au-delà de la mort
 
J\'ai grandi dans la tradition Catholique romaine qui accorde une place importante à l\'intercession des saints. Parfois, je me demande justement quelle est la différence entre ça et quelqu\'un qui fait du spiritisme. Je crois que les gens ont besoin de signes, pour s\'accrocher parfois. Tu parles de deuil. Ça me fait penser... Après la mort de mon père, ma mère a invité, pour le repas, certains des frères et sœurs de mon père. Après qu\'ils se soient quittés, ma mère m\'a raconté qu\'il y a eu comme une fluctuation au niveau de l\'électricité. Les lumières se sont éteintes et allumées très rapidement. Elle y a vu un signe que mon père était heureux de ça. Après quoi, en tant que bon théologien formé, je vais voir ma mère et lui dire non, non, non, non, non, ce n\'est pas comme ça que ça fonctionne, c\'est n\'importe quoi, ce n\'est pas une bonne foi. C\'était un signe, qu\'elle a perçu, elle, qui l\'a aidée dans son processus de deuil. Étant donné que, justement, on ne le sait pas, peut-être que c\'est elle qui a raison et que c\'est nous qui avons tort. Je pense qu\'il y a une certaine forme d\'humilité là-dedans : accepter que peut-être nous n\'avons pas la bonne réponse. Peut-être que c\'est plus complexe ou plus simple qu\'on ne l’aimerait.
 
Ressentir la présence après leur mort
 
C\'est difficile d\'avoir justement ces conversations-là avec les gens lorsqu\'on veut prouver ou rejeter quelque chose. Je reviens à la Bible et on lit dans le passage de 1 Corinthiens 15 : 49, que nous aurons un corps semblable au corps ressuscité de Jésus. Finalement, Jésus, après sa résurrection, leur a dit de le toucher et de le regarder manger. On voit que ce n\'était pas simplement un esprit. On a comme exemple de la résurrection ce double passage terrestre de Jésus, avant et après sa résurrection. On se dit que c\'est un petit peu le modèle qu\'on a, donc il est probable que notre corps aussi ressuscite d\'une façon ou d\'une autre. Il y a énormément de théories millénaristes; à un moment donné je m\'y étais intéressée et j\'avais même trouvé un tableau qui décrivait les différentes convictions selon les Églises de comment ça s\'organisera, en fait, quand il y aura l\'Armageddon. C\'est très complexe et à la fois très subtil. Tout ça nous montre qu\'on a besoin de savoir ce qui se passera après. Je reviens à des discussions pastorales que tu as eues, toi aussi Stéphane. Je pense à l\'un de mes paroissiens qui aimait beaucoup contredire et qui est maintenant décédé à Winterthur. Il venait aux activités paroissiales parce que c\'était en français et qu\'il se sentait seul. Mais lui, ce qu\'il aimait, c\'était être là pour donner du grain à moudre. Il aimait bien poser des questions. Et puis, il avait compris que ça m\'amusait beaucoup. On était allés manger ensemble plusieurs fois. Un jour, il me dit, je pense que tu vas me dire que je suis fou. C\'est un tout vieux monsieur. Je me dis que là, il va en falloir beaucoup pour que je lui dise que tu es fou. Il me dit « Tu sais, depuis que ma femme est morte, je considère qu\'elle est toujours là. Elle est avec moi quand je me lève, elle est avec moi quand je me couche. Mes journées sont un peu longues, je n\'ai souvent pas grand-chose à faire, mes enfants habitent loin. (Ils avaient deux maisons, une en France et une en Finlande. Il ne pouvait plus y aller pour des raisons de mobilité.) Mais heureusement qu\'elle est là avec moi. Et maintenant, tu penses que je suis fou? » Je me dis que non, je ne pense pas que tu sois fou. « Je pense que tu as tellement aimé ta femme et vous avez vécu tellement d\'années ensemble, qu\'évidemment d\'une certaine façon elle est avec toi ». Et je ne me prononcerai pas sur si c\'est de la folie ou pas. Il dit « Oui, mais tu vois, je vieillis; donc je sais bien, ça veut dire que dans mon cerveau, ça ne tourne plus tout rond, ça doit être pour ça ». Je lui dis « Écoute, que ce soit une raison cérébrale ou pas, en tout cas toi, ça te fait du bien ». « Oui, ça me fait du bien ». « Alors, écoute, pour moi, c\'est tout ce qui m\'importe en fait, c\'est que ça te fasse du bien et que ça ne te donne pas de faux espoirs. Tu sais qu\'elle ne va pas se rematérialiser à côté de toi maintenant » «Non, non, non, dit-il, je vais plutôt mourir et peut-être la rejoindre, si jamais ça existe. » Puis on rigolait quoi, tu vois.
 
Parler de mort et de vie après la mort avec des enfants
 
À partir de cette notion de rejoindre quelqu\'un, si jamais ça existe, je me rappelle de la toute première visite pastorale que j\'ai faite en stage. J\'étais toute jeune, tout feu, tout flamme. J\'allais être pasteur et puis c\'est tout. Et puis ma maîtresse de stage m\'amène et c\'était triste. Je donne un avertissement à cet endroit-là, je vais parler de deuil d\'enfant. C\'était triste : une maman qui avait perdu un bébé à la naissance. Donc c\'est terrible, la pasteure m\'emmène avec elle, on est dans un environnement familial, il y a des jouets partout, il y a un ou deux petits, je ne me rappelle plus. L\'entretien n\'a pas beaucoup de teneur, en fait. Comment ça va ? Ça ne va pas très bien. Et alors, les enfants vont à l\'école, oui, et puis vous, vous travaillez pour un bout, un peu, mon mari aussi. On ne se dit rien de spécial, franchement. Peut-être qu\'on fait une petite prière, mais ce n\'était rien de transcendant. Et la pasteure, assez vite, dit « bon, moi, je vais y aller, je vais repartir, j\'ai un peu de route ». Elle se lève, prend son manteau. Et là, le petit vient la voir et lui dit « Il est où mon petit frère? » La visite pouvait enfin commencer. C\'est au moment de partir que le petit s\'est dit « Mais ce n\'est pas possible, on parle de tout, sauf du truc qui me turlupine le plus, où est passé ce petit bébé que j\'ai vu grandir devant ma maman? On m\'a dit : tu auras un petit frère, sois gentil. Et il est où maintenant? » Du coup, on a une discussion. La pasteur lui dit : On t\'a dit qu\'il était où? On m\'a dit qu\'il était dans le ciel. D\'accord. Et qu\'est-ce que tu en penses? Bah, j\'en pense que c\'est un peu dangereux avec tous ces avions. La mère à côté passe par toutes les couleurs, quoi! La pasteure lui dit, tu sais que c\'est une façon de parler qu\'il est dans le ciel, il n’y est pas vraiment. Alors là, il est encore plus inquiet. Il lui dit, mais alors s\'il n’est pas dans le ciel, il est où? La pasteure lui dit, il est dans sa tombe. Alors il dit : il est tout seul? Mon petit frère est tout seul dans sa tombe? Et c\'était incroyable comme discussion; la mère à côté qui ne savait pas qu’en faire et en même temps se disait : heureusement qu\'on l\'a eue, cette discussion! Et c\'est là qu\'elle a pu lui parler de l\'amour réconfortant de Dieu, du fait que Jésus aussi était mort et puis qu\'il était auprès de Dieu et qu\'on ne savait pas vraiment ce que ça voulait dire. Ça voulait dire qu\'il y avait beaucoup d\'apaisement et qu\'un petit bébé comme ça, c\'est sûr qu\'on s\'en occupe bien, même si ce n\'est pas s\'en occuper de la même façon que s\'il avait été vivant. Mais qu\'il ne doit pas s\'inquiéter. Le bébé n\'est ni tout seul sous terre, ni en train de se faire dégommer par des avions dans le ciel. C\'était une vraie conversation. Qu\'est-ce qu\'on dit à un enfant de 4 ans? Je veux dire, c\'est compliqué. Et en même temps, cet enfant de 4 ans, on lui dit tellement de choses qui l\'inquiètent, entre sous terre et dans le ciel, qu\'il faut trouver des mots juste pour lui dire : ce n\'est pas ta responsabilité, ne t\'inquiète pas. Et puis il a existé, ce petit frère, et tu es quand même un grand frère.
C\'est vrai que moi-même, je ne sais pas que faire avec toutes ces formules. J\'accompagne, et toi aussi, des personnes endeuillées; je ne réponds pas quand on me dit, avec un faux aplomb de tristesse, « Bon ben, il est parti; mais de là-haut il nous protège, hein madame la pasteure? » J\'essaie de toujours répondre « Oui, Dieu protège tout le monde. Dieu nous protège de tomber dans des sentiments trop négatifs, Dieu nous protège d\'oublier qu\'il nous aime, Dieu prend soin de nous. Alors ils me disent : non, non, je parle de mon père là que vous avez enterré, il est là et il nous protège. Je réponds : je ne suis pas sûre, je pense qu\'il fait ses propres trucs.  Et d’autres fois aussi, c\'est beau, les gens me disent « Ah, je suis triste, j\'ai dû faire partir mon chien, il était trop malade. Mais c\'est bien, il a rejoint ma mère et ma mère aimait bien s\'occuper de mon chien. » Alors je dis « C\'est vrai, on ne parle pas assez des animaux morts au paradis. » Et pourquoi pas ? C\'est aussi une façon d\'avoir une infinie confiance dans ce qu\'on ne comprend pas du tout.
 
Avoir le courage d’aborder le sujet de la mort
 
Je t\'écoute; c\'est vrai qu\'on s\'attend à ce que monsieur ou madame la pasteure ait toujours les bonnes réponses pour expliquer ces choses-là. Et parfois, on est complètement démuni. On ne sait pas que dire, on n\'a pas de réponse intelligente. Mais je crois qu\'on a un appel à aider les gens, et parfois on a l\'appel de dire les choses. J\'ai souvent remarqué une espèce de tentative d\'édulcorer les situations. Sans être cruel, il faut dire les choses. Oui. Je l\'ai peut-être déjà raconté, les premières funérailles que j\'ai célébrées en tant que pasteur, près de trois mois après mon ordination, c\'était quelque chose d\'assez terrible. Quelqu\'un qui s\'était suicidé avec une carabine devant d\'autres personnes. C\'était très dur, très souffrant comme expérience pour la famille, pour les proches, pour le jeune pasteur que j\'étais. Dieu merci, j\'avais lu un livre quelques mois auparavant justement sur ces cas difficiles de funérailles. Une chose qui m\'avait marqué, cet auteur avait dit « Parfois, il faut mettre le doigt entre le bois et l\'écorce. » Il ne faut pas être cruel, mais il ne faut pas faire semblant, comme dans ce cas-là, que la crise n\'a pas eu lieu, que ce n\'est pas quelque chose de difficile à accepter. Il ne faut pas tomber dans une espèce de jovialisme. Et c\'est ça qui est difficile. Trouver les bons mots, trouver la bonne façon de réconforter sans nécessairement nier ce qui s’est passé. Je me souviens aussi de funérailles d\'un pasteur qui était malade et qui a commis l\'irréparable. Il s\'était présenté comme bon, « je suis avec Dieu » et tout ça, mais il y a plein de gens qui disaient : si un pasteur ne peut pas trouver l\'espoir, qu\'est-ce qu’il me reste à moi? Et cette question-là n\'a jamais été abordée. Donc, il faut faire attention, être pastoral; il faut faire attention aussi de ne pas dire n\'importe quoi, d\'inspirer de l\'espoir, de parler de notre foi, dire qu\'il y a un continuum. Moi, c\'est ça que je crois, qu\'il y a cette vie sur terre et je crois qu\'il y a un niveau d\'existence au-delà de cette mort-là. Par exemple, dans un texte de l\'Église unie du Canada qui s\'appelle « La confession de foi de l\'Église unie du Canada »  (pas très original comme titre!), il y a un passage qui dit « Dans la vie, dans la mort, dans la vie au-delà de la mort, nous ne sommes pas seuls, Dieu est avec nous ». On voit le cheminement : la vie, la mort et une vie au-delà de la mort, c\'est ce qu\'on croit. Et notre espoir, c\'est que Dieu est avec nous. Peu importe ce qui se passe, on n\'est pas abandonné dans tout ça. Mais encore une fois, on parle de croyance, on parle de foi, on ne parle pas de certitude.
 
Qu’est-ce que le paradis
 
C\'est vrai que j\'ai peine à formuler comme ça, de façon claire, nette et concise, la conception du paradis qu\'on pourrait avoir en théologie luthéro-réformée. Je me rappelle que c\'était une question que j\'avais posée à ma première maîtresse de stage, elle m\'avait cité un verset, mais je ne l\'ai plus retrouvé dans la Bible, où on dit que c\'est comme quand Dieu nous prend dans ses bras… comme un père aimant. C\'est un peu compliqué de savoir ce que ça recouvre. Il y a ces notions de se retrouver. Est-ce qu\'on va retrouver toutes les personnes qu\'on a aimées? Est-ce qu\'on va aussi retrouver les personnes qu\'on n\'a pas trop aimées? D\'où cette question des veufs et des veuves. C\'est-à-dire, est-ce qu\'il faudra choisir entre deux personnes? Ça n\'a pas l\'air très paradisiaque, ça. Si on a eu un animal de compagnie pas spécialement charmant, est-ce que vraiment on va devoir encore s\'en occuper? Est-ce qu\'il s\'agit d\'une autre forme de vie, de communion, quelque chose justement de très apaisé, comme on nous le dit souvent? Personne ne peut vraiment trancher. C\'est peut-être la marque qu\'un mouvement est sectaire, lorsqu\'il t\'affirme quelque chose. Et en même temps, il y a cette question des expériences de mort imminente, qu\'on a à un moment donné surestimé, ensuite décrié, et qui reviennent par la petite porte comme quelque chose à quoi s\'intéressent finalement de plus en plus de théologiens et de neurologistes. On dirait qu\'il y a peut-être quelque chose à en apprendre, mais nos Églises n\'en parlent pas.
 
La vie après la mort est-elle pour tous et toutes
 
Toute cette notion de paradis est tellement difficile. Je me souviens, au collège théologique, un de nos professeurs nous avait demandé est-ce que le paradis est seulement pour les chrétiens? Bonne question! Il nous avait donné un exemple : d\'après vous, qui a le plus de chances d\'être au paradis? Gandhi ou Hitler? Hitler était chrétien. Gandhi n\'était pas chrétien. Qu\'est-ce qu\'on fait avec ça? Et ça me fait penser à cette vieille blague. Quelqu\'un meurt, se présente au paradis, et saint Pierre fait un peu la visite. Ils ouvrent une porte, c\'est plein de moines tibétains qui font des chants de gorge, c\'est superbe. Ils ouvrent une deuxième porte, c\'est des gens qui viennent de Tahiti, chantant, c\'est merveilleux. Et juste avant d\'arriver devant la troisième porte, Saint Pierre dit à la personne « Chut, il ne faut pas faire de bruit, là » « Pourquoi ? » « C\'est la salle des chrétiens et ils croient qu\'ils sont les seuls à être ici ». C\'est excellent.
Et tu parles des animaux, pourquoi pas? Je ne sais pas, ça me fait penser à cette conférencière Amy Jill Levine qui avait cette idée-là : si le paradis existe, si c\'est le domaine de Dieu, c\'est Dieu qui décide qui rentre et qui ne rentre pas. Ce n\'est pas moi qui peux dire à Dieu, hé oh, j\'ai fait telle, telle, telle chose, je suis allé à l\'église toutes les semaines, donc j\'ai le droit d’entrer et j\'ai le droit de décider que l\'autre personne n\'a pas le droit d’entrer. Il faut croire que Dieu a ses propres règles, ses propres façons de décider, et ça nous remet en question. Peut-être que c\'est quelque chose de tellement difficile pour nous. On doit abandonner notre désir de contrôle, de décision. Ça ne nous appartient pas. Quelle est cette vie au-delà de la mort à laquelle nous croyons, ça ne nous appartient pas. Qui aura accès à cette vie au-delà de la mort? Ça ne nous appartient pas. Je suis un pasteur, mon épouse est athée. Qu\'est-ce qui se passe après la mort? On a deux points de vue différents. Qui a raison? Ni l’un ni l\'autre ne le sait et ça ne nous appartient pas.
 
Conclusion
 
Je peux en tout cas te dire que vous serez dans des pièces différentes, visiblement ! En tout cas, merci pour cette conversation. On espère avec cette thématique ne pas avoir répondu à tout et avoir aussi suscité d\'autres questions. On serait content pour notre saison 4 de continuer la réflexion sur ces notions de paradis. Écrivez-nous, tenez-nous informés, dites-nous comment ça joue pour vous, comme on le dit ici dans le canton de Vaud. Vous pouvez nous écrire par courriel, entre autres à : [email protected]  Nous voulons remercier notre commanditaire, l\'Église Unie du Canada, qui publie un site internet www.moncredo.org qui explore, un peu comme nous, des questions de foi, de spiritualité à travers des podcasts, des blogues, des vidéos. Merci beaucoup, Johanne, pour cette conversation. Et si je peux me permettre, joyeuses Pâques! Joyeuses Pâques!